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Olga de Amaral - Cheffe de fil du Fiber Art

Cloison, suspension, plafonnier, sculpture, tapisserie, comment définir ces objets tressés qui flottent dans les salles de la fondation Cartier ? C'est tout le mystère de l'oeuvre si légère et fragile de Olga de Amaral. Née à Bogota, formée entre le Mexique et les États-Unis, et aujourd'hui cheffe de fil du Fiber Art, ce mouvement issu du modernisme, qui mêle les possibilités du tissu et entremêle les matières à l'infini. En Colombie, elle grandit entourée des pratiques traditionnelles de fabrique d'étoffes et autres textiles, ces mains qui tricotent et détricotent, avec un geste précis et rapide. C'est à New York, au sein d'une école fortement influencée par le Bauhaus de Dessau, qu'elle se forme ensuite à ces techniques, expérimentant l'utilisation des pigments, manipulant la matière, s'essayant à une pratique avant-garde de la tapisserie.

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Vue de la première salle d'exposition, Fondation Cartier Olga de Amaral

Ce métissage dans sa formation est au coeur de son oeuvre, car tout ces liens tissés entre ses doigts reflètent ceux qui font son inspiration. La modernité de New York, et la tradition de Bogota, les églises catholiques Colombienne et les ruana que l'on porte dans les andes, les liens qui accompagnent ses longues années de vie ... Toute sa carrière, elle repoussera les limites du "tissu", tantôt simple fil de coton, tantôt écrin de cheval, pigmenté, plié, noué, collé : les possibilités sont infinies entre les doigts d'Olga de Amaral.La liberté que nous accorde ses pièces est, selon moi, ce qu'il y a de plus frappant. Leur accrochage m'a mené à me balader spontanément, zig-zaguant entre les tapisseries : le fil comme medium permet de regarder au travers de l'œuvre, de contempler ses ombres, et de s'effrayer du temps qu'il a nécessité pour arriver à la forme finale de chaque oeuvre. L'artiste nous livre également un petit aperçu de ces paysages Colombiens, avec des suspensions aux formes et couleurs qui nous font voyager dans les Andes.

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Vue de la première salle d'exposition, Fondation Cartier Olga de Amaral
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Vue d'exposition, Fondation Cartier Olga de Amaral

Le second élément qui rend cette exposition importante est la question qu'elle soulève vis-à-vis du métissage, le métissage comme une chance et conséquence de la colonisation de l'Amérique du Sud. En effet, Olga de Amaral fait un rappel des dorures des églises catholiques de Bogotta dans ses pièces, en recouvrant de feuilles d'or ses tapisseries, qui sont elles-mêmes faites selon des techniques colombiennes ancestrales de tissage. Appliquer cet or, et couvrir ainsi le tissage traditionnel n'est pas anodin, et m'évoque la période historique où le christianisme s'est répandu en Amérique du Sud, sous l'effet de la découverte du nouveau continent et de sa colonisation, remplaçant ce qui pré-existait, des pans entiers de la culture locale et ancestrale. Cela pose également la question du lieu d'exposition : quid de la place de la Fondation Cartier, au milieu de ces questionnements sur le rôle de l'Occident dans les trames narratives sud-américaines ? 

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Vue d'extérieur, Fondation Cartier Olga de Amaral

Une chose est sûre toutefois : cette dynamique de métisser les cultures pré-hispaniques et occidentales n'est pas nouvelle, et a été la source d'inspiration de nombreux artistes sud-américain, du mexicain Diego Rivera, au péruvien José Sabogal, en passant par les peintres de l'École de Cuzco. Mais ici, Olga de Amaral n'adresse pas seulement le thème du métissage à travers les choix artistiques de ses pièces. Elle le fait aussi à travers sa pratique du Fiber Art même : rappelons que ce mouvement est le fruit des apprentissages du Bauhaus et du modernisme, qui mettaient un point d'honneur à mélanger l'art et l'artisanat, afin de briser les frontières entre les disciplines, tout en enrichissant les pratiques grâce à une utilisation plus large de matières et de techniques, comme c'est le cas pour l'utilisation du tissu dans le cas de Olga de Amaral. Et en temps que grande amatrice du Bauhaus, je raffole toujours des artistes qui s'en rapprochent !Petit plus pour conclure cet article, l'exposition est gratuite les mardis et les jeudis soirs jusqu'à sa fermeture pour les moins de 26 ans, ce qui permet de profiter d'un décor nocturne à travers les grandes baie-vitrées de la Fondation. N'attends plus !

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